dimanche 30 octobre 2016

Le Ruisseau de mon enfance

Ce chapitre conçu avec l’étroite collaboration de mon frère et ami Rachid Seba, est dédié à tous mes amis du Ruisseau.

Ces photos accompagnées d’une interprétation et d’une mélodie musicale pour la partie vidéo peuvent être soumises à des droits d’auteur.

1.      L’EX USINE BLACHÈRE ET SES FILS – LE HUSSEIN-DEY-

Photo prise le 27 août 2015


Digne fleuron des grandes industries de l’époque, l’ex usine Blachère et ses fils – insistons sur la filiation – aura longtemps fait parler d’elle.
Fondée en 1925, aussi vieille que son nom, l’ex usine Blachère et ses fils fut spécialisée dans les constructions métalliques, la matériel vinicole et les pompes de huilerie et de pompage à eau …
On voit hissée à la droite de la photo, tel un fanion, une plaque métallique de couleur bleue qui porte l’inscription « réparation de pompes Recta ». Le « Blachère et ses fils»  d’aujourd’hui, n’est à ma connaissance qu’un simple réparateur de pompes qui s’est « arrogé » depuis bien longtemps le label « Recta ».
Grisée par la monotonie, l’ex usine Blachère et ses fils semble avoir perdu son éclat lumineux depuis belle lurette. Il est bien loin le temps où Blachère et ses fils régnaient en grand maître sur cet univers industriel. Une époque où le Hussein-Dey, rue Brossette, promenait l’étoffe d’une grande ville industrielle ou le nouvel Ambert.
Un ton morne et gris enveloppe cette photo qui nous rappelle les premières manufactures anglaises de l’époque de la reine Victoria.
On parlera pour la circonstance, de Mr Bousson, excusez l’orthographe, un brillant ingénieur diplômé de l’école les arts et les métiers de Paris. Une éminente matière grise que j’ai eu le privilège de connaître lors d’une visite effectuée en compagnie de mon père dans l’ex usine Blachère et ses fils, en 1968. Je venais d’avoir quinze ans.



2.      L’EX USINE SIDESAL – I – LE HUSSEIN-DEY-

Photo prise le 27 août 2015


On distingue sur la photo la porte d’entrée de l’ex usine SIDESAL d’Hussein-Dey. Elle présente la forme d’un arc dont le sommet est pourvu d’une nervure, symbole de richesse et de noblesse, disait-on. Elle est formée d’un claveau et d’un sommier sur lesquels repose un piédroit. L’extrémité de l’imposte est projetée vers l’extérieur. Les fenêtres, dites arc en anse de panier, disposent uniquement d’un claveau. Le voussoir n’étant pas apparent et les parties saillantes de l’imposte se retrouvent, tout comme celles des portes, dirigées vers l’extérieur.
Un merveilleux style artistique où l’architecte aborde un thème d’une même composition géométrique, peu variée. Chaque ligne, trait, élément … que l’on voit sur la photo s’accordent à faire parler d’eux et à faire revivre un nouvel art de vivre qui a pour nom SIDESAL.
Une couleur rouge qui incarne la fureur de vivre du siècle passé. Une couleur blanche, signe de pureté, de virginité et de paix … Cette fois, SIDESAL aura résisté tout de même jusqu’à « l’extinction des feux ».


3.      L’EX USINE SIDESAL –II – LE HUSSEIN-DEY-

Photo prise le 27 août 2015


Un style de construction importé d’Irlande, que l’on voit généralement dans la Louisiane, et qui n’est pas sans rappeler l’esprit d’une chapelle. Remarquons la toiture, ou châssis vitré, une œuvre habilement exécutée où dominent la clarté, la lumière et l’aération … Tout un art de ferronnerie où brille le vitrage et où se mêle peu la charpente métallique.
Un vitrail qui servira également de revêtement pour les différentes toitures ou coupoles de ces beaux immeubles de la rue de La lyre, de Charras,  de Cervantès, de Mulhouse … et de tant d’autres.
N’oublions pas les pompes SICLI Afrique, les pompes GUINARD, les pompes MENGI, les pompes ASTER, les pompes FARGET, les pompes BAYARD, les pompes LOUNI
Le narrateur déplore que l’ex usine DURAFOUR, fer de lance de l’industrie de l’époque, pourtant située dans la même lignée que ces dernières, ait été privée de photo.


4.      LES EX Ets BROSSETTE ET SES FILS –I – LE HUSSEIN-DEY-


                                                                                                                  Photo prise le 27 août 2015




Une expérience bien originale que le photographe a bien voulu réaliser avec un vieil appareil photo de marque Kodak, illustre et unique témoin de l’époque. Le développement de la pellicule a été effectué dans un laboratoire photo à Alger. La qualité de l’image y est réussie grâce au traitement de bains spécifiques à ce vieux procédé. Le photographe s’est imprégné du cadre de cette première photo « Jomone » pour mieux faire ressortir les détails y afférents à cette époque (cliché, lieu, heure, saison…). Peine perdue, selon les uns. Réussi, selon d’autres. Il est utile de rappeler que la photo légende n’étant pas en sa possession, ce jour là. Voyons tout de même ce que nous offre l’avenir incertain, plus de 60 ans après.
Nous sommes au mois d’août. C’est la période des congés annuels. Les rues sont désertes en ce mois de grandes vacances et les ex Ets Brossette sont fermés. On aperçoit mal sur la photo l’ex immeuble des vins Pernod, à demi-caché par ce gigantesque ensemble mur-rideau, siège de la firme sud-coréenne HUYNDAI. On distingue mal également le fameux Pont Lafarge, bel ouvrage des ingénieurs du génie-civil de l’époque.

5.      LES EX Ets BROSSETTE ET SES FILS – II – LE HUSSEIN-DEY-

Photo prise le 27 août 2015



Une couleur d’un bleu ardoise témoigne encore de la chaleur des vieux murs des ex Ets Brossette qui conserve à ce jour un arrière goût de l’époque. Comme qui dirait, une légère touche de Zola qui réapparaît sous un jour nouveau aigri par l’âge et terni par le nombre des années ingrates.
Longtemps spécialisés dans la diversification des produits, dits de hautes technicité, les ex Ets Brossette disposent de toute une gamme variée de matériaux de construction : fabrication, commercialisation et vente de profilés en acier, poutrelles, tréfilés, profilés spéciaux, couverture et habillage métalliques, ciments, dynamite, explosifs et accessoires de tir …
Fondés en 1841, les ex Ets Brossette furent les premières industries coloniales à fouler la brousse africaine. Ils porteront la dénomination de F. Brossette et Cie, des Ets Brossette et fils, de Brossette Valor et eurent pour conseillers, présidents et administrateurs généraux, les personnalités suivantes : Henri Brossette, Paul Brossette, Pierre Lacroix, Franck Cartier, Robert Dussaux, Jean Marette, Christian Permezel, Pierre Dède … Les ex Ets Brossette disposent d’un bureau au 40, rue du Président Pré-Gaudy à Lyon et d’un siège au 7, rue Kléber à Paris (16).
A chaque nouvelle étape de leur vie de grand-maître industriel, Brossette et ses fils créent un nouveau look et feront parler d’eux. A chaque moment important de leur histoire, Brossette et ses fils investissent dans un nouveau créneau et marquent des points. Qu’ils soient en Afrique noire (Occidentale ou Équatoriale) en Algérie, en Tunisie ou dans d’autres contrées lointaines, Brossette, Durafour, Hamelle, Blachère, Ducro d’Oran, L’Union Industrielle Africaine de Maison-Carrée … auront contribué au rayonnement du fer, de l’acier, du bronze, de la fonte, de l’aluminium, en Afrique et ailleurs …
Les ex usines Brossette Algérie furent absorbées par le géant N° 1 du fer et de l’acier Arcelor Mittal dont on voit les caractères portés sur les murs de l’entrée de l’usine. Ce dernier cédera la totalité de ses actions estimées à 70% à l’État algérien et quittera définitivement l’Algérie.
Souvenons-nous de ces petites portes de protection en fonte striée, munies d’un fermoir vers le haut, sur lesquelles on y lit l’inscription Brossette, et qui serviront de caches pour les compteurs à gaz et à eau que l’on voit jusqu’à ce jour dans les quartiers populaires d’Hussein-Dey.
Les Ets Brossette furent représentés sous quatre signes distinctifs :
-           La première armoirie laisse apparaître un lion majestueusement hissé sur ses pattes arrières. Un symbole de puissance et de virilité, qui fut à son apogée en cette fin du XIXe siècle, et qui demeure à ce jour le label des limonaderies Hamoud Boualem et des ex Cafés Nizière.

-           Le second logo incarne l’image emblématique de la vieille tradition séculaire des Biwacht. Une photo légende où l’on voit au loin la silhouette d’un pionnier suisse aguerri, debout et posant en grand conquérant, sur le sommet d’une verte prairie helvétique. Un chapeau à large bord sur la tête, un piolet à la main droite, ce chef louveteau saura véhiculer la légende de l’homme suisse, digne défricheur des temps anciens.

-           Le troisième insigne représente une gamme variée de métaux lourds. On y aperçoit de très près le V de Valor auréolé de deux profilés, en forme d’ailerons, au niveau de chaque extrémité.

-           Quant au quatrième et dernier écusson, c’est tout le continent de l’Afrique Occidentale Française, vu du ciel, et chasse gardée des ex Ets Brossette, qui est représenté sur une carte de géographie. A sa gauche, on y distingue une vue en perspective des ex usines métallurgiques Brossette .

Implantés dans la quasi-totalité des terres de l’ex Afrique Occidentale Française, les ex Ets Brossette attribuèrent à leur division Afrique l’appellation de Société Africaine des Ets Brossette, de Société équatoriale des Ets Brossette et de Société tunisienne des Ets Brossette.
Savorgnan de Brazza, Livingstone, Stanley, furent les premiers missionnaires à avoir exploré l’Afrique. Brossette aura été sans doute le premier industriel à avoir jeté les jalons d’une nouvelle ère industrielle sur le continent africain. L’Afrique a-t-elle su relevé le défi ? Qu’en est-il aujourd’hui ?à Port-Etienne actuel Nouadhibou capitale de la Mauritanie.
-         à Dakar capitale du Sénégal.
-         à Bamako capitale du Mali.
-         à Conakry capitale de la Guinée.
-         à Lomé capitale du Togo.
-         à Abidjan capitale de la Côte-D’Ivoire.
-         à Ouagadougou et au Burkina ville et capitale de la Haute-Volta.
-         à Cotonou et au Dahomey ville et capitale du Bénin.
-         à Zinder, à Maradi et à Niamey villes et capitale du Niger.
-         à Douala, au N’gaoudéré et à Yaoundé villes et capitale du Cameroun.
-         à Port-Gentil et à Libreville ville et capitale du Gabon.
-         à Pointe-Noire et à Brazzaville ville et capitale du Congo.
-         à Bangui capitale de la République Centrafricaine.
-         à Fort-Lamy actuel N’djamena capitale du Tchad.
à Tunis… avenue de Madrid capitale de la Tunisie.


6.      LES ABATTOIRS DE LA RUE DE POLIGNAC -I- LE HUSSEIN-DEY-

Photo prise le 27 août 2015


Qui aura prédit un instant que ce sont les grands abattoirs du Ruisseau, que l’on voit sur la photo ? Construits selon les vieilles techniques de l’époque, les abattoirs du Ruisseau dissimulent dans leurs entrailles un véritable abri souterrain. Un enchevêtrement de barres métalliques dans les sous-sols des abattoirs nous renseigne sur le supplice impitoyable infligé à ces pauvres créatures avant leur passage à l’acte rituel.
On voit sur la photo, l’entrée des vieux abattoirs du Ruisseau. C’est ici, que venaient s’approvisionner la boucherie Alger-viandes du Ruisseau, les casernes militaires, les cantines scolaires, les réfectoires populaires et n’oublions pas, Khiar le gargotier du Ruisseau. Même Fuji Film, le leader  japonais de la photo, fait partie de la clientèle attitrée des abattoirs du Ruisseau.
N’oublions pas la Société Industrielle et Commerciale des Abattoirs Frigorifiques d’Afrique …(S.I.C.A.F.A) qui fut transférée en 1955 à Ouagadougou au Mali, sous la dénomination de Usine d’Emballage Industrielle et Frigorifique et qui se situe loin, derrière les grands abattoirs du Ruisseau.

7.      LES ABATTOIRS DE LA RUE DE POLIGNAC -II- LE HUSSEIN-DEY-

Photo prise le 27 août 2015



1928, telle est l’inscription gravée sur le fronton de l’entrée principale des vieux abattoirs du Ruisseau. On voit sur la photo de belles maisons de montagne en forme de chalets, vieille figure d’un passé colonial révolu. Un mode de construction prédominant dans le sud-est de la France. Elles abritaient à l’étage supérieur le siège de la direction générale. Au rez-de-chaussée, s’y trouvaient les services du personnel, des achats et ventes, et des finances …
Naguère, à une trentaine de mètres de l’entrée, un tourniquet imposait un passage réglementé à un cheptel à l’allure déchaîné.

8.      LES ABATTOIRS DE LA RUE DE POLIGNAC -III- LE HUSSEIN-DEY-

Photo prise le 27 août 2015


Les grands abattoirs du Ruisseau. Un nom aux consonances sinistres pour des maisons de rêve qui réapparaissent de nouveau, comme pour effacer la mémoire indélébile de ces innocentes victimes. Les vieux abattoirs du Ruisseau, un hécatombe de têtes de bétail doté d’un équipement sophistiqué en son temps, toujours performant en ce siècle.
Aux abattoirs du Ruisseau, il n’y a pas que l’abattage. Il y’a aussi ces beaux chalets savoyards où viennent se greffer les tiges ligneuses d’une courge qui semble défier l’atmosphère cruelle et invivable de l’endroit.



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